Le secteur de la construction est en pleine transformation grâce à l’avènement des bâtiments intelligents, ouvrages qui, au-delà de simples édifices, deviennent de véritables plateformes numériques. Ces bâtiments offrent un large éventail de services visant à optimiser le confort, la sécurité, l’efficacité énergétique et la sûreté. Pour que l’expansion d’un ensemble d’actifs immobiliers soit un succès, il est impératif de mettre en place une gestion efficace des bâtiments et de leurs données. Pour mieux saisir l’enjeu, l’AICN (Alliance Immobilière pour la Convergence Numérique) et la Smart Buildings Alliance ont tenu le 17 octobre dernier une conférence réunissant plusieurs experts du secteur dans le cadre du salon IBS. Au fil des discussions, 4 points clés ont été identifiés pour optimiser le pilotage des bâtiments et in fine, réussir le passage à l’échelle d’un parc d’actifs immobiliers. Retour sur ces échanges.

 

Animée par Yves TUET, coordinateur de l’AICN, la conférence avait pour ambition d’ouvrir la voie vers une exploitation plus intelligente et plus durable de nos actifs immobiliers. De nombreux intervenants de renom, dont Éric BOUVIER, Chief Data Officer de La Française, Guillaume DAGAN, Chief Impacts Officer de Groupama Immobilier, Didier LAFFAILLE, Chef du service de la prospective et de l’innovation à la CRE (Commission de Régulation de l’Énergie), Benoit GRIGAUT, Directeur du développement d’Equans Digital et Administrateur de la SBA, et Blaise SOLA, Directeur Méthodes & Innovation chez Artelia et Vice-président Smart Building de la SBA, s’y sont succédés. Au programme : des réflexions inspirantes sur la gestion des données, l’interopérabilité des systèmes et les perspectives passionnantes qui façonneront l’avenir du bâti.

 

Gérer l’inflation des prix de l’énergie

L’introduction de la conférence a mis en lumière les défis énergétiques que rencontre l’industrie immobilière. Comme pour beaucoup de secteurs, les prix de l’énergie ont considérablement augmenté, exerçant une pression sur les coûts d’exploitation des bâtiments. Pour Didier Laffaille, de la Commission de Régulation de l’Énergie, cette augmentation est le reflet du manque de ressources en Europe. Selon lui, pour équilibrer la production et la consommation, il est primordial de gérer ces ressources efficacement. Tous les intervenants se sont accordés sur la nécessité d’améliorer la sobriété et l’efficacité énergétique pour faire face à ce défi pressant.

Sur ce même sujet, Guillaume Dagan, Chief Impacts Officer chez Groupama Immobilier, ajoute : « Si nous ne parvenons pas à maîtriser ces coûts énergétiques, cela affectera directement la rentabilité des bâtiments, ce qui est une préoccupation majeure pour les investisseurs immobiliers. Nous sommes passé d’une économie de plus-values de transactions à une économie de cash-flows, c’est donc une inflexion complète du marché. »

Premier constat : la viabilité des actifs immobiliers est étroitement corrélée à une bonne gestion des consommations énergétiques et de la performance énergétique des bâtiments.

 

Découvrez le replay de la conférence

 

Maîtriser la conformité réglementaire et gérer la multiplication des normes

Ces dernières années, les normes qui s’appliquent à l’industrie immobilière se sont multipliées comme la taxinomie, le Dispositif Éco-Énergie Tertiaire ou encore le décret BACS. La conformité est devenue un enjeu incontournable, obligeant les acteurs à repenser leurs processus et à adopter de nouvelles méthodes. Un constat porté par Éric Bouvier, Chief Data Officer chez La Française : « Il y a de plus en plus de règles et de normes, et toutes ces obligations nécessitent une collecte importante de données à travers la chaîne de valeur de l’immobilier. »

Selon les experts, cette transformation ne peut pas être abordée de manière traditionnelle. Il faut développer de nouvelles approches pour répondre à ces besoins de conformité. Pour réussir la transition vers des bâtiments intelligents à grande échelle, l’interopérabilité des systèmes est essentielle. En effet, si chaque producteur de données a son propre format, les collecteurs n’arriveront pas à industrialiser le reporting, ou si réciproquement chaque donneur d’ordre veut un format particulier, les producteurs de données n’arriveront pas à l’industrialiser. Dans les deux cas, les données arriveront en retard, seront peu fiables, et non conformes aux exigences règlementaires.

Second constat : il est crucial de développer des référentiels bien définis et d’intégrer la mise en conformité règlementaire dans les plans pluriannuels d’investissements et de travaux.

 

Miser sur la digitalisation de l’expérience utilisateur (client, employé, patient, prestataire, etc.)

Les bâtiments ne sont plus seulement des espaces physiques, ils deviennent des environnements numériques où l’expérience utilisateur doit être optimisée. C’est en tout cas la conviction de Yves Tuet, coordinateur de l’AICN : « Nous devons proposer autre chose que de recopier des données dans des tableaux Excel. Les occupants des bâtiments, tout comme les employés des prestataires attendent des expériences plus riches et connectées pour être fidélisés, et plus largement, pour vivre une expérience augmentée : gagner en productivité, accéder à de nouveaux services, améliorer la qualité de vie au travail… »

Troisième constat : créer des espaces attractifs et différenciés grâce à la digitalisation des expériences est un atout majeur pour les propriétaires et les gestionnaires d’actifs notamment.

 

Optimiser l’attractivité des bâtiments tout en préservant leur valorisation

L’importance de préserver la valeur des investissements dans les systèmes de bâtiments intelligents a été soulignée par chaque intervenant. Pour Blaise Sola, le directeur Méthodes & Innovation d’Artélia : « Un immeuble attractif est un immeuble qui préserve sa valorisation et c’est essentiel pour tous ceux qui investissent dans les systèmes. ». Dans un contexte où les plus-values sur les transactions immobilières sont moins importantes, les bâtiments doivent générer des revenus grâce à une gestion intelligente et efficace.

Pour Benoît Grigaut d’Equans Digital, un autre grand défi consiste à concilier les besoins du secteur immobilier, qui opèrent sur un horizon temporel plus long, avec les avancées technologiques rapides de l’industrie de la tech. Il suggère de : “ne pas toujours compter sur des partenaires technologiques pour résoudre les problèmes, mais plutôt, de s’appuyer sur les équipements et les systèmes existants pour répondre aux besoins en matière de performance et d’ouverture des données.”

Ainsi, l’attractivité d’un bâtiment repose notamment sur la flexibilité, la réduction des charges et notamment l’efficacité énergétique, la conformité et la digitalisation des expériences. Désormais, à défaut de pouvoir bien valoriser un actif il faut au moins faire en sorte qu’il ne perde pas de sa valeur, ce qui n’est possible que si l’actif :

  • répond aux nouveaux besoins d’utilisation
  • est économe et sobre 
  • est conforme à toutes les nouvelles règlementations
  • est cybersécurisé

Pour les acteurs de l’immobilier, cela signifie concevoir des bâtiments qui conservent leur valeur tout en offrant une expérience utilisateur optimale. Dernier constat : bien gérer l’actif numérique est clé pour conserver sa valeur.

 

Le passage à l’échelle des actifs immobiliers intelligents nécessite un engagement collaboratif en vue d’une standardisation continue et d’une adoption généralisée des pratiques de smart building. Ces axes prioritaires, à savoir la conformité, la digitalisation, l’attractivité et la gestion de l’énergie, sont essentiels pour un meilleur pilotage des bâtiments et pour massifier le déploiement du numérique dans le secteur de la construction.

 

 

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